Prison. Vers un contrat de travail spécifique ?

Un quart des détenus français, soit 17 000 personnes, travaillent en prison. Ils n’ont actuellement pas de contrat de travail, pas d’assurance-chômage, pas de RTT, ni le droit de faire grève ou de se syndiquer. Si les initiatives se multiplient pour favoriser l’emploi pénitentiaire, un travail est en cours pour le « normaliser », l’encadrer juridiquement. Emmanuel Macron, lors un discours prononcé en 2018 à Agen devant les élèves de l’Ecole nationale d’administration pénitentiaire, a plaidé pour « que le droit du travail, en étant adapté évidemment à la réalité et aux contraintes de la prison, puisse s’appliquer aux détenus ».

Le ministère de la Justice envisage de nombreuses pistes : création d’un véritable contrat entre le détenu et l’administration pénitentiaire, voire avec l’entreprise directement. Plusieurs chantiers sont déjà en cours, notamment sur la modernisation des règles de cotisation et de contribution sociales ou un contrat d’engagement pour les détenus en apprentissage qui débutera dès janvier 2020.

Actuellement, le travail pénitentiaire est encadré par le Code de procédure pénale. La dernière tentative de « normalisation » remonte à la loi Dati de 2009 qui a instauré un « acte d’engagement » professionnel entre le détenu et la prison, également en charge du recrutement. L’encadrement du travail pénitentiaire gommerait de nombreuses inégalités. Les détenus travaillent soit au service général (cuisine, plomberie, buanderie), dans des ateliers installés dans les prisons par des entreprises (300 en 2017 dont Yves Rocher, Sodexo et des PME) ou pour la Régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP). Cette dernière fournit les salaires horaires les plus élevés (5,26 euros/heure en 2017) car les tâches sont plus qualifiées (prospection commerciale, conception de mobilier pour les collectivités, numérisation d’archives pour l’INA…).

Il souffre des effets de la crise, des délocalisations et de la robotisation des tâches à faible valeur ajoutée qui engendrent un recul du nombre de postes proposés (-16 % depuis 2000). Parallèlement, la demande de travail explose. « Les détenus ont vraiment besoin de travail » souligne le sociologue Melchior Simoni car le temps de détention est long et leur salaire leur permet de s’offrir de la viande, du tabac, des produits de la vie courante qui sont en vente sur un catalogue dédié. Par ailleurs, le travail permet d’indemniser les parties civiles, d’obtenir des remises de peine et de préparer la réinsertion.