Décrochage. La fracture numérique et le confinement, des risques pour les étudiants en licence

Les universités, fermées depuis mi-mars, le resteront jusqu’à la fin de l’été. Les examens se dérouleront à distance, chaque établissement étant libre de sa propre organisation. Les enseignants sont inquiets : ils craignent de perdre le contact avec leurs étudiants, notamment ceux de licence.

Comment peuvent-ils concilier continuité pédagogique à distance et travail dans les commerces alimentaires ? Plateforme de travail en ligne et production sur téléphone portable ou zone blanche ? Production intellectuelle et vie familiale ?

Pour les soutenir, Jean-François Perez, psychologue à l’université d’Avignon, a ouvert une permanence depuis le 16 mars. Par téléphone ou visio, les étudiants peuvent se confier à lui. Mais il n’a actuellement reçu qu’une trentaine d’appels, soit « 40 % de moins que son activité habituelle à cette période de l’année », indique-t-il. Les appelants sont des étudiants perdus, « sans visibilité sur la continuité pédagogique ». Vivant seuls ou sans connexion Internet, ils « ne parviennent plus à se projeter ni sur la façon de suivre leurs cours, ni sur la façon dont ils vont être évalués ». Ils sont très angoissés.

Benoît Tock, vice-président de l’université de Strasbourg chargé de la formation rappelle que le décrochage se situe à près de 40 % en première année de licence et qu’il « n’y a aucune raison pour qu’il ne s’aggrave pas en de telles circonstances ». Pour maintenir le lien et réduire la fracture numérique, son établissement a contacté par SMS ses 50 000 étudiants pour recueillir leurs besoins en matériel informatique. « 130 personnes ont sollicité un prêt d’ordinateur et/ou 200 extensions d’abonnement ou abonnement à un réseau internet soit 0,5 % des étudiants ». Par ailleurs, une autre menace guette : la précarité économique des étudiants qui travaillaient en plus de leurs études et qui ont été licenciés ou sont au chômage partiel.

Yves Jean, président de l’Université de Poitiers indique que 25 % à 30 % de ses étudiants de 1ère et 2nde année de licence n’ont répondu à aucun mail contre 8 à 10 % en 3e année de licence et 0 % en master. De son côté, Nicolas Offensdat, maître de conférence en histoire à Paris-1-Panthéon-Sorbonne estime, optimiste, que ce n’est pas parce que les étudiants ne répondent pas aux mails qu’ils ne les lisent pas ou ne font rien. Il leur faut trouver une organisation, une motivation après le « moment de sidération » lié au confinement, processus qui « ne se traduit pas forcément par un décrochage de leur part ».

Reste maintenant l’inconnue des modalités d’examen de fin d’année et l’organisation de la rentrée de septembre.